Questionnaire 2022 – Réponse de Nathalie Arthaud

Dans le cadre de la présidentielle 2022, nous avons envoyé un questionnaire à chacun des 12 candidats afin leur donner l’occasion d’exprimer leur position sur les questions monétaires.

Les questions que nous avons posées sont les suivantes :

  1. Pensez-vous que la Création Monétaire puisse être utilisée à des fins politiques ? Si oui comment comptez-vous l’orienter ?
  2. Selon vous, dans quelle mesure les décisions concernant la Création Monétaire (qu’elles soient prises par les pouvoirs publics ou les banques) peuvent avoir un impact sur la lutte contre le chômage et la pauvreté ?
  3. Dans quelle mesure peuvent-elles avoir un impact sur la qualité des services publics ?
  4. Dans quelle mesure peuvent-elles contribuer à la réalisation d’objectifs écologiques ?
  5. Enfin, dans quelle mesure peuvent-elles avoir un impact sur la sécurité nationale ainsi que la promotion de coopération internationales ?
  6. Selon le porte-parole de la CADTM, plus de 95% des échanges de devise sont de type spéculatif; le volume des transactions sur les monnaies atteint en effet 6600 milliards de dollars par jour en 2019, soit 123 fois le volume moyen des exportations mondiales de marchandises. Que comptez-vous mettre en place pour limiter ce type de mouvements de capitaux ?
  7. Seriez-vous prêts à accorder un pouvoir de création monétaire aux Monnaies Locales Complémentaires et Citoyennes (MLCC) ?
  8. Souhaitez-vous réformer l’Eurosystème ? Dans quel sens ?
  9. Si oui, dans quelle mesure est-ce urgent ? Que fixeriez-vous comme date limite pour les réformes envisagées ?
  10. Que changeriez-vous dans le modèle de gouvernance de la monnaie ?

Pensez-vous que la Création Monétaire puisse être utilisée à des fins politiques ? Si oui comment comptez-vous l’orienter ?

Vous trouverez ci-dessous la réponse de la candidate Nathalie Arthaud.

Pantin, le 14 mars 2022

Voici, brièvement, quelques éléments de réponses à vos interrogations autour de la création monétaire et de son rôle.

J’y réponds de façon globale pour deux raisons essentielles à mes yeux :

  • D’une part, il n’est pas question pour moi de jouer à la candidate « comme les autres » et de prétendre, point par point, présenter une politique alternative à celle qui est en place aujourd’hui dans un catalogue de propositions ou de mesures prétendument savantes. C’est d’autant plus vrai qu’en économie, c’est l’incertitude et le fonctionnement chaotique qui domine. Tous ceux qui prétendent être à même de comprendre le rôle de chaque rouage, pris isolément des autres, et le levier monétaire en est un, sont en réalité des bonimenteurs.
  • D’autre part, et c’est sans doute plus fondamental encore, la création monétaire n’est pas un objet « à part », mais bien le thermomètre d’une maladie incurable qui a atteint toute l’économie mondiale : celle du profit et, et façon consubstantielle, celle de la spéculation cette « pompe à phynance » pour reprendre l’expression d’Afred Jarry et de son Père Ubu. Cet auteur décrivait une société où le despote distribuait de l’argent au peuple… pour lui reprendre sous forme d’impôts. Ubuesque le volume de la masse monétaire aujourd’hui ? Non, tout simplement capitaliste. De même que l’inflation, les dettes publiques et la spéculation qui l’alimentent.

J’en reviens donc à l’essentiel de mon propos. Je m’appuierai pour cela sur la remarque vous formulez vous-mêmes dans votre question N°6. Vous soulignez en effet que « Selon le porte-parole de la CADTM, plus de 95% des échanges de devise sont de type spéculatif ; le volume des transactions sur les monnaies atteint en effet 6 600 milliards de dollars par jour en 2019, soit 123 fois le volume moyen des exportations mondiales de marchandises. »

Je n’ai pas vérifié les chiffres, qui de toute façon à ce niveau ne signifient plus grand’ chose, ni ne les actualisés, car je suis convaincue que ce volume n’a fait que croître depuis.

Mais je dirai qu’en un sens la réponse est dans votre question : tant que l’humanité n’aura pas mis la main sur ces sommes et sur leur possesseurs (industriels, banquiers, actionnaires, etc.) elle ne sera pas en mesure de maîtriser véritablement son économie et donc son avenir. Il n’est plus question simplement ici de « masse monétaire » mais d’un véritable marteau-pilon qui écrase les travailleurs et les peuples.

Ma solution n’est par conséquent ni d’ordre « monétariste » ni « économique » au sens strict de ces termes, mais politique : ma perspective est l’expropriation de la classe capitaliste et le pouvoir des travailleurs. Elle ne dépend d’aucune façon d’une réforme de la « gouvernance de la monnaie » comme vous le demandez. Débarrassée de l’exploitation, du diktat du profit, de la concurrence et de l’anarchie de ce système productif, la monnaie pourra devenir un simple instrument de comptabilité publique avant d’être remisée, avec bien d’autres outils des politiques publiques actuelles, au musée du mode de production capitaliste.

Bien cordialement, Nathalie Arthaud

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