Certes, le contrôle politique de la monnaie ne résout rien en lui-même; il n’offre pas de solution immédiate à l’approvisionnement énergétique, aux problèmes de gestion et de corruption de l’État, aux conflits géopolitiques de par le monde. Il ne dit pas comment une telle réforme dans votre pays sera accueillie par les grandes puissances étrangères, publiques et privées, et comment contenir l’agressivité des uns tout en obtenant le soutien des autres. Il ne permet pas non plus en lui-même de savoir si la récolte sera bonne ou mauvaise l’année prochaine.
Mais il donne à l’intérêt général les moyens de sa politique. Il permet de sortir d’une situation où les problèmes s’accumulent non pas par manque de solutions, mais parce que celles-ci croupissent dans des cartons où l’austérité économique les a enfermées. Il offre un cadre où les grandes orientations pour le futur ne seront plus portées par quelques milliardaires visionnaires, mais partagées par l’ensemble de la population à travers les processus démocratiques.
Il permet aussi de sortir d’une logique de démantèlement des États, où ces derniers n’ont aucun contrôle sur le crédit, sont dépendants des marchés financiers, et maintiennent un système qu’ils dirigent de moins en moins.
C’est en cela que nous disons que le contrôle politique de la monnaie est vital : dans ce contrôle réside le choix entre développement et effondrement économique, entre plein emploi et chômage de masse, entre vision à long terme et un pillage court-termiste des ressources. C’est toute la différence entre une destinée collectivement choisie ou subie.
Nous sommes conscients que face à de telles considérations sur l’organisation des gouvernements, on peut se sentir comme face à un vide. Comment réclamer un tel changement à nos hommes politiques ? Peut-on vraiment intéresser la population à ces réflexions abstraites, qui interviennent certes sur les causes, mais sont loin des problématiques quotidiennes ? Doit-on vraiment croire en ces conceptions alors que, même si l’Histoire a eu plutôt tendance à les valider, elles ne bénéficient encore que d’un faible ancrage universitaire ? Et, typiquement dans le cas de l’Union Européenne, ne doit-on pas plutôt trouver une autre solution pour colmater les problèmes immédiats, sachant qu’un tel changement sur la monnaie, s’il devait être négocié par les canaux habituels et avec les personnalités habituelles, ne verrait pas le jour avant au moins une dizaine d’années ?
Ces questions ne trouveront pas de meilleure réponse que vos actions personnelles et collectives. Vous pouvez vous faire vous-mêmes porteur de cette idée et guetter chaque occasion de la transmettre, à commencer par faire lire cet article. Si vous pensez que notre classe politique est défaillante, vous pouvez tâcher d’en comprendre les raisons et franchir vous-mêmes la barrière. Si vous êtes professeur ou étudiant en économie, poussez à fond cette idée de contrôle politique de la monnaie et dans un sens ou dans l’autre, donnez-lui l’autorité qu’elle mérite.
Enfin, ne sous-estimez pas l’importance d’une action collective coordonnée.
Dans tous les cas, interrogez-vous véritablement sur les conséquences de ce qui a été exposé ici, au-delà du simple objet d’étude intellectuelle. Projetez-vous pleinement et intimement dans un monde où seraient mis en place ces nouveaux moyens, puis dans un monde où nous laisserions se déployer les travers actuels du système.
Vous réaliserez sans doute que l’avenir nous offre de très belles perspectives, mais que le temps nous est compté.